Elle a tout juste vingt ans et arrive du sud avec un petit accent rocailleux et chantant qui s’accorde bien à sa personnalité pleine d’énergie. Elle pétille, littéralement. Elle porte beaucoup de bijoux et à peine un trait de crayon sur les paupières. Elle pourrait être l’héroïne d’un film de Rohmer. Pour le moment, j’habite chez mon grand-père, explique-t-elle. Le dernier « R » roule en cascade au coin de son sourire. Elle n’a pas de formation, à peine trois mois d’expérience. Elle ne le dit pas mais on devine qu’elle a fui. Quoi? Un petit ami collant, une famille trop exigeante, des rêves fracassés. Qui sait? Elle se débrouille. A déjà travaillé dix jours ici, un mois-là. Elle ne sait pas encore bien où elle va, mais elle s’en sortira. C’est sa bonne étoile qui le lui a promis. Et elle, sa bonne étoile, elle y croit.
A l’heure où les médias n’hésitent pas à se faire le relais d’idées nauséabondes, qui condamnent les plus fragiles en les désignant comme des parasites, des assistés ou des fraudeurs, j’ai eu envie de faire contre-poids en vous livrant ces esquisses de personnes croisées dans une association où je donne un peu de mon temps.