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Raconter la vie

Il est livreur. Elle est libraire. Il est handicapé. Elle est institutrice à la retraite.

Photo du 43497025-02- à 12.04Leur point commun? Ils racontent leur vie sur le site participatif lancé à l’initiative de Pierre Rosanvallon, pour faire sortir de l’ombre les invisibles, ceux dont on ne parle jamais, ceux que les puissants ne voient pas.

Voilà ce qu’on peut lire sur le site :

Par les voies du livre et d’internet, Raconter la vie a l’ambition de créer l’équivalent d’un Parlement des invisibles pour remédier à la mal-représentation qui ronge le pays.

Il veut répondre au besoin de voir les vies ordinaires racontées, les voix de faible ampleur écoutées, les aspirations quotidiennes prises en compte. En faisant sortir de l’ombre des existences et des lieux, Raconter la vie veut contribuer à rendre plus lisible la société d’aujourd’hui et à aider les individus qui la composent à s’insérer dans une histoire collective.

Pour « raconter la vie » dans toute la diversité des expériences, la collection accueille des écritures et des approches multiples – celles du témoignage, de l’analyse sociologique, de l’enquête journalistique et ethnographique, de la littérature.

Toutes les hiérarchies de « genres » ou de « styles » y sont abolies ; les paroles brutes y sont considérées comme aussi légitimes que les écritures des professionnels de l’écrit.

Raconter la vie est la communauté de ceux qui s’intéressent à la vie des autres.

Après avoir, pendant quelques années, pratiqué le métier d’écrivain public et contribué à recueillir les souvenirs de diverses personnes, ce projet ne pouvait que m’intéresser.  Il existe pour le moment cinq contributions éditées en format papier. Les autres sont lisibles sur le site en PDF.

Au rayon papier, j’ai choisi « Moi, Anthony, ouvrier d’aujourd’hui » et  » La course ou la ville ». Deux livres d’une soixantaine de pages, recueillant l’expérience d’une ou plusieurs personnes dans un domaine particulier. On y lit des choses incroyables. Comme ce livreur qui explique à Eve Charrin, la journaliste qui suit sa tournée :

« La dame de la formation nous a dit : « Il ne faut jamais donner tort au client, ne pas s’en approcher de trop près, ne pas le regarder dans les yeux ». Ne pas regarder dans les yeux, c’est un conseil qu’on donne aussi en cas de rencontre avec un chien menaçant ou un animal sauvage.

Anthony, l’ouvrier d’aujourd’hui, se pose des questions sur l’incontournable lettre de motivation.

Je me demande souvent pourquoi il faut en passer par là. Pourquoi il faut jouer la comédie comme ça. Ceux qui lisent ta lettre de motivation savent bien que tu t’en tapes. Mais ils font semblant d’y croire. C’est comme une sorte de jeu obligatoire. Ce serait impensable de dire : « Votre boulot est pourri. Bon, mais faut bien manger à la fin du mois ». Alors que c’est la stricte vérité.

J’ai lu également d’autres témoignages sur le site. J’ai trouvé l’ensemble extrêmement intéressant et instructif. Il me semble que c’est une initiative à soutenir. Et qui donnera peut-être envie à certains d’entre vous de prendre votre plume pour témoigner à votre tour .

Une belle manière de tisser (de repriser!) le lien social mis à mal par la doctrine néolibérale…

(Pour les inconditionnels d’Annie Ernaux, « Regarde les lumières, mon amour« , qui est le journal des visites de l’auteur à l’hypermarché paraitra bientôt dans cette collection.)

Le site Raconter la vie

La Fabrique des Imposteurs

imgresJe ne me plonge que très rarement dans le brouhaha médiatique, mais j’aime, entre deux romans, lire parfois un essai*. Le livre de Roland Gori aborde le thème de l’imposture, et à travers lui, questionne notre société de la norme, de l’expertise, où la forme tend à prendre de plus en plus le pas sur le fond.

S’appuyant sur des exemples très concrets – agences de notation, scandale du Mediator, certification, etc… – l’auteur montre que notre société, « plus soucieuse de l’apparence des actes que de leurs effets et de leurs vertus », encourage l’imposture. Lire la suite La Fabrique des Imposteurs

Parcours commando

Depuis que mon fils aîné vit sur la planète kaki (comprenez : ce grand fou est entré dans l’Armée de Terre…), je m’intéresse de près (enfin, pas trop quand même, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit!) à tout ce qui porte un treillis.

imgresC’est la raison pour laquelle j’ai eu envie de lire « Parcours Commando », du célèbre Marius, aux éditions Nimrod. A vrai dire, j’ai entamé le livre un peu comme on fait ses devoirs. Et là, surprise, moi qui pensais mettre une semaine, ou plus, pour venir à bout de ce pavé, je l’ai dévoré en deux jours! C’est un témoignage, mais ça se lit comme un roman. Et un bon roman! Lire la suite Parcours commando

Une féministe, une vraie.

Je viens de terminer Instinct Primaire, publié dans la collection Les Affranchis, chez Nil, et je ne peux pas différer le moment de vous en parler. C’est la longue lettre d’une femme amoureuse à celui qu’elle a failli épouser. Failli, oui, puisque devant l’autel, ayant mis dans la balance son amour et sa liberté, elle a choisi, et fui. 

Après cette fuite, l’homme aimé n’a jamais cherché à savoir les raisons de cette dérobade. Il a refusé toute explication et tout contact. Alors, c’est par cette missive que la narratrice tente d’expliquer son geste.

Leur histoire a commencé classiquement, pourrait-on dire. Il était marié, elle était sa maîtresse. Elle avait réussi à trouver dans ce rôle son équilibre, car le mariage est à ses yeux une insupportable restriction de la liberté.

Le mariage, c’est signer un contrat dans lequel il est stipulé qu’il ne faut plus jamais tomber amoureux de quelqu’un d’autre. Est-ce que  l’on a si peur de perdre l’autre que l’on soit obligé de lui mettre un contrat autour du cou? Jamais je ne me suis imaginée t’enchaîner à moi par peur de te perdre. Pourquoi te contraindrais-je à rester avec moi si tu ne le veux pas? Je ne veux pas d’un homme qui resterait par devoir.

Cependant, cette position est difficile à tenir dans le regard des autres, tant chacun aime à juger, et souvent condamner, celui ou celle qui ne fait pas comme tout le monde, celui qui s’éloigne de la norme pour aller vers la marge.

La narratrice doit aussi faire face au regard des femmes. Parce qu’elle choisit de se dédier totalement à son art – l’écriture – et que pour cela elle ne veut ni le licol du mariage ni la responsabilité de mère, elle est sommée de justifier son attitude. Son plaidoyer prend alors l’allure d’une diatribe contre les normes sociales, et les femmes elles-mêmes, qui par leur attitude ambivalente et manipulatrice, se maintiennent dans une position de victimes vulnérables.

Où que tu ailles sur la planète, la femme ne se définit toujours pas en tant qu’être humain, seulement en tant que femme, en tant qu’instinct de reproduction ou de procréation et elle refuse de modifier sa façon de voir.

La narratrice récuse cet « instinct primaire » qui pousse les femmes à se positionner en fonction de leur utérus.

La femme est-elle allée au-delà de sa naturalité? Non. Est-ce qu’elle le veut? Non plus. Est-ce qu’elle ne s’est pas interdit le choix? Absolument. Toutes les femmes n’ont pas l’instinct maternel mais elles ont toutes une amie qui dit tu vas le regretter un jour.

Et pour enfoncer le clou, elle ajoute :

Le féminin qui se revalorise par la mission de la maternité ne peut pas être un progrès.

imagesInstinct primaire est un texte court mais fort. Qu’on soit homme ou femme, on ne peut pas rester indifférent aux questions qui sont posées. Qu’est-ce qu’aimer? Qu’est-ce qu’être un homme? Une femme? Et comment faire évoluer nos rapports? Au bout du compte, cette longue lettre ne pose pas d’autre question que celle du prix de la liberté. A quoi sommes nous prêts à renoncer pour être vraiment libres?

Pia Petersen défend, à mes yeux, un vrai féminisme. Non pas une femme qui se définirait par rapport aux hommes mais par rapport à elle-même, en tant qu’être humain pensant et libre.

J’ai été très sensible aux arguments de l’auteur dans ce récit. Je partage depuis longtemps certaines des idées énoncées.

Il est extrêmement difficile d’adopter un autre point de vue que celui, général et bien pensant, qui prévaut. C’est un défi permanent d’inventer, au jour le jour, des rapports qui ne soient pas dictés par les conventions ou le regard des autres (en amour, mais aussi dans les relations avec ses amis ou ses enfants par exemple…). Qui n’a pas eu envie, un jour, d’embrasser, de serrer dans ses bras, de partager un moment en tête à tête, avec un ami ou une amie proche? Mais ça ne se fait pas. Ça pourrait être mal interprété. Et c’est là qu’on renonce à cette commune humanité qui devrait nous souder au lieu de nous diviser.

Mais il y a les autres. Ce n’est pas si évident d’être affranchi des normes, ce n’est pas si simple de créer sa propre ligne de vie.

Le cœur n’est pas un champ clos. N’est-ce pas le sous-employer que de se contraindre à n’aimer qu’une seule personne toute une vie durant? Faut-il mettre sur le même plan le mariage, l’amour et la sexualité? La passion, la passade et l’amitié amoureuse? Personne ne supporterait de manger toujours le même repas, de lire le même livre, de regarder le même programme télé, de suivre indéfiniment le même itinéraire. Et pourtant, en amour, c’est à cela que des principes d’un autre âge nous condamnent.

Bien souvent, pour ne pas peiner, pour ne pas choquer, pour n’être pas rejeté, on se résigne. On ferme son cœur, ses sens. On tire le rideau de fer pour n’être plus touché, amusé, ému, séduit. Pour ne pas tomber dans un marivaudage qui ferait jaser. Pour ne pas risquer d’être emporté par une histoire qui nous dépasserait.

Et c’est à cet instant qu’on devient sec. Et vide. Et malheureux.

Journal ambigu d’un cadre supérieur

L’humain est-il soluble dans le milieu acide de l’entreprise? Oui! a-t-on envie de répondre en refermant ces notes de bureau écrites par Etienne Deslaumes.

Tout commence, comme bien souvent aujourd’hui, par une fusion. Minerve Immobilier absorbe les Assurances  du Sphinx. Panique dans les rangs des salariés. Qui va rester? Qui va partir? E*** fait partie de ceux qui restent. Dans un premier temps, il est évidemment soulagé. Il se retrouve sous la direction d’Iban Lanziéga. Mais son répit est de courte durée car les méthodes managériales de Lanziéga – qu’il surnomme la Bête –  sont d’un style particulier et néanmoins très courant aujourd’hui.

Si je devais, d’un terme, qualifier l’ambiance de travail à Minerve Immobilier sous le règne d’Iban, j’oserais celui de peur – tout le reste en découle. Il s’agit d’une peur diffuse mais épaisse, intermittente mais poisseuse. Même dans les bons moments, et il y en a, nous sommes tous en sursis ; d’une seconde à l’autre, Iban peut quitter son enveloppe de nounours, sinon sympathique, du moins patelin, pour se transformer en furie tonitruante. Une extrême versatilité, un défaut absolu de maîtrise de lui-même, une propension à la violence et, disons-le, un goût pour cette violence caractérisent au quotidien cet homme qui a construit sur des complexes un pouvoir mal compris.

IMG_20130313_090751Le mot est lâché : pouvoir. Comme on le verra au fil des différents chapitres qui dressent de cruels portraits et relatent le quotidien terne de ces bureaux, il n’est pas tant question de productivité ou de résultats que de pouvoir. Le pouvoir est partout et avec lui, en cortège : manipulations, trahisons, coups bas, actes d’allégeance, retournements de veste, guerre d’usure ou blitzkrieg…

Narrée d’une plume alerte et concise, cette histoire se révèle aussi passionnante qu’un roman d’espionnage, aussi captivante qu’un thriller psychologique. Elle dresse surtout un tableau accablant d’une certaine conception de l’entreprise. Heureusement, ça ne se passe pas partout comme ça… On a peu parlé de ce roman sur les blogs pourtant, il vaut le détour. Par sa qualité mais aussi parce qu’ils ne sont pas si nombreux, les auteurs qui s’attachent à montrer l’envers, parfois bien sombre, du monde du travail.

Journal ambigu d’un cadre supérieur, Etienne Deslaumes, Editions Monsieur Toussaint Louverture. 

Comme par un fait exprès, paraissait il y a quelques jours dans le quotidien Le Monde cet article sur la dure vie des salariés.

Ils désertent

Du précédent livre de Thierry Beinstingel – Retour aux mots sauvages – je garde un excellent souvenir.

imgres-1En commençant Ils désertent, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. J’ai été un peu étonnée par cette manière qu’a l’auteur de s’adresser à ses personnages : tutoiement pour la jeune femme, commerciale fraîchement embauchée dans une entreprise qui vend des canapés et des papiers peints, vouvoiement pour le plus vieux commercial de la boite, celui que les autres appellent l’ours ou l’ancêtre et qui fait, malgré l’âge, toujours le meilleur chiffre d’affaires…

Ils désertent, c’est le récit de leurs trajectoires croisées. Elle est encore pleine d’énergie et d’illusions. Obéissante, elle a pour mission première de virer l’ancêtre. Lui, sculpté par cette vie harassante qui pendant quarante ans, l’a fait sillonner toutes les routes de France et tester les matelas trop mous de tous les petits hôtels ne veut pas partir.

Je n’ai pas envie d’en dire davantage. Il faut découvrir ce roman qui, en quelques traits dessine les pièges et les leurres de notre vie moderne. L’écriture de Thierry Beinstingel se fait sèche quand il s’agit de décrire le monde actuel, sans âme et sans élégance et tendre quand il évoque ses personnages, leur vie, leur toute petite vie, si minuscule qu’elle pourrait presque passer inaperçue. Avec un talent consommé, il fait ressortir l’humain, ce noyau dur que le management, l’argent, le pouvoir ne parviennent pas à entamer. La fin, que d’aucuns trouveront peut-être trop heureuse, porte en elle cet espoir auquel nous nous raccrochons tous, à un moment ou à un autre de notre vie de pouvoir dire : non, stop, ça suffit… 

A lire et à faire lire!

Ils désertent, Thierry Beinstingel, Fayard, 19€

Le grand Cœur

Né à Bourges, Jean-Christophe Rufin a grandi à l’ombre du palais de Jacques Cœur. Il n’en fallait pas plus pour qu’il soit fasciné par cet homme et entreprenne – à défaut de pouvoir faire rapatrier sa dépouille de l’île de Chios où Cœur est mort – une biographie romancée de celui qui fut l’Argentier de Charles VII et le premier à développer les relations commerciales avec le Levant.

Traqué par des ennemis multiples, condamné à rester sur l’île de Chios où il s’est réfugié, Jacques Cœur entreprend de raconter ses mémoires. Son enfance d’abord et sa rencontre avec Macé, celle qui deviendra sa femme. Puis son premier voyage en Orient, son association avec Ravand, un monnayeur peu scrupuleux et comment celle-ci l’a envoyé au cachot pour un temps. Puis il décrit la grande idée de sa vie : développer le commerce, particulièrement avec les pays d’Orient. Pour ce faire, il doit entrer dans les bonnes grâces du roi Charles VII, l’inciter à cesser la guerre qui ravage le pays depuis trop longtemps et développer tout un réseau d’hommes de confiance. Au bout du compte, une richesse infinie, une amitié amoureuse avec Agnes Sorel, la maîtresse du roi et le risque de provoquer, pour ces deux raisons, l’ire du monarque…

Jean Christophe Rufin a mis beaucoup de lui-même dans ce roman et dans la bouche de Jacques Cœur. Il le dit dans la postface. Comment faire autrement puisqu’il ne reste de cet homme que des informations sur sa fortune et son activité? C’est à la fois le mérite et la limite de cette biographie romancée. Elle a l’avantage de faire sortir de l’ombre un homme que l’Histoire telle qu’on l’enseigne néglige souvent, de lui donner cœur et chair, de le rendre vivant, palpitant, amoureux. Mais elle bute aussi sur ces limites historiques. Point de place pour l’imaginaire : les repères historiques constituent des bornes au-delà desquelles l’imagination de l’écrivain ne peut aller. Au final, un roman très bien écrit, qui fait émerger un Jacques Cœur passionné et souvent passionnant mais qui n’est pas exempt de longueurs et pâtit du côté un peu « guindé » que recèle toute tentative biographique.

Le grand Cœur, Jean-Christophe Rufin, Gallimard

Qu’a-t-elle vu, la femme de Loth?

Si le titre de ce roman grec fait directement référence à la Bible – la femme de Loth, trop curieuse, s’est retournée vers Sodome détruite et a été changée en statue de sel – l’histoire, elle, se situe entre passé et présent.

D’un côté, Paris et l’Europe du Nord, seuls rescapées du Débordement qui a englouti le sud et le Proche-Orient. De l’autre, une étrange colonie, créée spécialement pour assurer l’exploitation d’un sel violet que le reste du monde s’arrache à prix d’or et maintenue dans une sorte d’arriération, tant mentale que matérielle.

Voilà pour le décor. Passons aux personnages.

A Paris, un étrange petit homme, Philéas Book, dont toute la famille a péri lors du Débordement et qui gagne sa vie en réalisant des « lettres croisées » pour le Times. Ces lettres croisées sont issues de toutes les missives envoyées par les survivants ou ceux qui les cherchent. Philéas vit dans la nostalgie d’un monde perdu et la culpabilité d’être le seul parmi les siens à avoir survécu. Ces lettres sont sa quête, celle qui lui permet de croire qu’un jour peut-être, il retrouvera les gens qu’il a aimés.

Dans la Colonie, six personnages dont le lecteur ne connaîtra que les lettres de témoignage, à la suite des péripéties tragi-comiques qui, pendant quinze jours, vont agiter ce lieu dément. Un médecin, un juge, un commandant, un prêtre, le secrétaire et la compagne du Gouverneur : tous pleins de turpitudes, de mensonges et d’obéissance…

Et en guise de lien entre ces personnages, la Compagnie. Illustration du pouvoir totalitaire qui terrorise et corrompt, incarnation d’une logique néo-libérale poussée à son paroxysme, cet organisme dont on ne sait rien et dont on ne peut que constater les effets délétères, est passé maître dans la manipulation, la rétention d’information, l’enrichissement à tout prix et le pouvoir absolu… La Compagnie sait tout, voit tout et prévoit tout… Sauf une chose. Et c’est cet évènement qui va faire sauter les mécanismes huilés par la peur et la compromission de ce monde angoissant…

Un roman détonnant! J’ai eu un peu de mal à y entrer – la présentation des différents protagonistes sous forme de lettres embrouille au début plus qu’elle n’éclaire – mais cet obstacle surmonté, je me suis plongée dans cette histoire, de plus en plus ferrée et pressée d’en connaître le fin mot. C’est une sorte de roman d’anticipation mais pas vraiment. Une critique sociale mais pas seulement. Un théâtre d’ombres et de bouffonnerie mais plus que cela. Bref, c’est un roman difficilement classable – comme souvent le sont les romans écrits par des auteurs grecs… – mais qui mérite vraiment qu’on s’y intéresse. En plus, bien écrit, il est aussi très bien traduit.

Merci Keisha pour cette découverte, sans olives ni féta, mais qui m’a néanmoins beaucoup plu!

Qu’a-t-elle vu, la femme de Loth? Ioanna Bourazopoulou, Ginkgo Editeur. 

Ce roman s’inscrit parfaitement dans le challenge le Pari Héllène… 

Bayard et le crime d’Amboise

C’est à l’occasion du Festival Rue des Livres, à Rennes, où j’ai eu le plaisir de rencontrer Eric Fouassier que j’ai fait l’acquisition de ce roman, premier volet d’une trilogie. Je n’ai pas tardé à me plonger dans ce polar historique et au bout de deux pages, j’étais déjà complètement absorbée par l’histoire…

L’action se déroule en 1498, au château d’Amboise. Le roi Charles VIII décède brutalement des suites d’une mauvaise chute. Tout le monde croit à un malheureux accident sauf Pierre Terrail, seigneur de Bayard, qui s’est récemment illustré par son courage et sa bravoure à la bataille de Fornoue. Ce dernier obtient du premier chambellan Philippe de Commynes et de l’épouse du roi, Anne de Bretagne, quelques jours pour mener son enquête, comprendre ce qui s’est réellement passé et surtout qui a pu commettre ce crime.

Il sera aidé dans sa quête par la délicieuse Héloïse Sanglar, fille d’apothicaire et femme de tête, qu’il a rencontrée lors d’un tournoi de jeu de paume. Face à eux, un assassin sans pitié mais qui semble n’être qu’un des rouages d’une terrible machination…

A la lecture de Bayard ou le crime d’Amboise, on devine que l’auteur, Eric Fouassier, a pris grand plaisir à faire ce bond en arrière dans le temps et à se couler dans une époque lointaine où l’hérédité et l’épée dictaient leur loi. L’histoire est menée tambour battant, avec une sorte d’allégresse à laquelle le lecteur ne peut pas résister. Tous les ingrédients du bon polar historique sont rassemblés : une intrigue bien ficelée, des rebondissements en série, des duels dignes du Bossu, des méchants prêts à tout et les beaux yeux d’une jeune femme auxquels notre héros ne peut résister…

L’auteur a fait de nombreuses recherches et s’est amusé à glisser ici et là quelques mots empruntés au passé. On devine qu’il a également porté une grande attention aux détails. Les vêtements, l’atelier de l’apothicaire, les instruments du bourreau, la disposition des salles du château sont si précises qu’on s’y croirait…

Loin des flics dépressifs venus du nord, ce Bayard pur et audacieux a tout pour séduire les lecteurs et les lectrices et il me tarde déjà de le retrouver dans la suite de ses aventures.

Allez Eric, au travail, vite, vite! 🙂