Du domaine des murmures

Avoir une rentrée littéraire de retard n’est pas désagréable. L’emballement pour les titres des auteurs attendus au tournant s’est calmé. On peut lire à tête reposée, sans urgence et sans pression. C’est ainsi, en tout cas, que j’ai abordé ce Domaine des Murmures, de Carole Martinez, qui a remporté le Goncourt des Lycéens l’année dernière.

C’est au Domaine des Murmures que vit Esclarmonde, fille chérie que son père s’apprête à marier à Lothaire, un jeune et rustre chevalier. Pour échapper à sa condition de femme mariée et donc soumise, elle décide d’être emmurée dans une chapelle dédiée à Sainte-Agnès, à côté du chateau de son père. Là, elle n’a plus qu’un hagioscope qui lui permet de suivre la messe et une fenestrelle qui lui révèle un peu des couleurs du monde.

A mi-chemin entre foi et supersition, Esclarmonde devient, sans le vouloir, une sorte de protectrice pour les gens de la région ainsi que pour tous les pèlerins qui transitent par les Murmures. Elle qui voulait consacrer sa vie à prier doit écouter, rassurer, guider tous ceux qui s’en remettent à sa sagesse et à sa foi. Son ancien fiancé, Lothaire, profondément transformé, vient lui chanter des chansons d’amour courtois qui la troublent.

Mais un évènement imprévu va venir bouleverser le quotidien d’Esclarmonde et plus encore ses certitudes. Violée le jour de son enfermement, la jeune femme met, en effet, au monde un fils. Et cette chair de sa chair dont elle sait qu’elle va devoir se séparer, lui brise le cœur et étouffe sa foi…

Je me suis attachée au verbe d’Esclarmonde et ai suivi sa progression avec intérêt. J’ai trouvé que l’histoire était vraiment originale et riche. Et vraisemblable, qui plus est. C’est vraiment un tour de force de donner à cette pucelle du XIIème siècle cette voix et cette présence. La féminité et la maternité me semblent être les deux cœurs de ce roman qui n’en manque point… Cependant, il s’en est fallu d’un petit quelque chose pour j’entre vraiment dans l’histoire et sois transportée. Pour que l’intérêt se transforme en coup de cœur.

Du domaine des Murmures, Carole Martinez, Gallimard

Si vous voulez lire davantage de billets sur ce titre, je vous renvoie vers celui de Noukette qui en recense un grand nombre.

Ceux et celles qui ont lu le roman comprendront le pourquoi de l’illustration… 😉

48 réflexions sur « Du domaine des murmures »

  1. Comme tu as pu le constater dimanche, il est dans ma PAL (depuis fin juillet-pret de Somaja) mais j’ai encore des « urgences »a lire avant… J’ai hate bien sur …même si ce n’est pas un total coup de coeur pour toi !! 🙂

  2. Je n’ai eu aucun mal à entrer dans cette histoire, quant à l’écriture de Carole Martinez, j’étais déjà convaincue .. C’est une bonne idée delire avec un an de décalage, tu as raison, la pression est retombée, la lecture est plus sereine.

  3. est ce que je peux me permettre une petite remarque ? je trouve un peu dommage de révéler la maternité quand on parle du livre, surtout pour ceux qui ne l’ont pas encore lu. Je dis ça parce que de mon côté je n’aurais pas aimé le savoir avant. Pour moi c’était presqu’un coup de coeur aussi, c’est le passage sur les croisades qui m’a moins plu?

  4. En plein dans le rush l’an dernier, j’ai eu envie de le lire et puis plus, ayant entendu tout et son contraire. Et le livre n’était jamais disponible à la bibliothèque. Aujourd’hui, je me pencherais bien dessus, plus calmement comme tu dis.

    1. @ Ys : l’emballement médiatique (et bloguesque) brouille la lecture, surtout quand il s’agit, comme là, des romans dont on glose. On en attend beaucoup ou bien on s’en dégoûte sans avoir ouvert le livre en question. Un an ou deux après, le bruit a cessé et on lit plus à son aise… Une expérience intéressante! 😉

  5. Je reconnais que ce roman a de nombreuses qualités et que Carole Martinez écrit remarquablement bien. Mais le sujet ne m’a pas vraiment passionné. C’est une étrange sensation de ne pas apprécier un roman auquel on reconnaît de nombreuses qualités…

    1. @ Midola : Qu’il s’agisse du Cœur Cousu ou de celui-là, je ne suis pas enthousiasmée mais j’admire l’originalité et le style. Je suis donc un peu dans la même situation que toi.

  6. Lu aussi avec quelques mois de décalage. Par curiosité. Pas du tout convaincue, je dois bien l’avouer. Il m’a manqué une profondeur, une présence, l’ensemble m’a paru trop proche de la fable ( genre que j’apprécie pourtant ) mais qui ne m’a pas semblé convenir au propos qui se voulait humain. De même, le contexte moyenâgeux m’a paru trop didactique, quelque chose de  » scolaire « . Bref, quelque chose de trop appuyé pour m’emporter.

  7. J’ai beaucoup aimé ce roman, contrairement à toute attente de ma part… et j’ai été ravie d’entendre Carole Martinez en parler quelques temps après lecture. Elle est vraiment passionnée et passionnante !

    1. @ Kathel : je ne l’ai pas entendue mais son roman m’intriguait suffisamment pour me donner envie de le lire même si je ne faisais pas partie des fans du Cœur cousu…

  8. J’ai bien aimé, vraiment, l’écriture, le sujet, tout… (et même si le soufflé médiatique est retombé, je trouve que tu en dis trop avec le viol…) Par contre, je ne me souviens plus pourquoi la petite fraise des bois ??

    1. @ Anne : Esclarmonde est enfermée et elle voit, par sa fenestrelle, une petite fraise des bois qui lui fait terriblement envie et lui rappelle tant de souvenirs… C’est sa servante qui la cueille et la gobe. Sans autre forme de procès, comme dirait l’autre.

    2. Il me semblait avoir laissé un message qui disait comme Anne, je trouve dommage d’en dire un peu trop surtout pour les gens qui n’ont pas encore lu le livre. Je n’aurais pas aimé connaitre ce passage du livre avant de le lire.

      1. @ Sandrine : j’ai retrouvé ton commentaire, il était passé dans les indésirables, je ne sais pas pourquoi… Oui, c’est vrai, j’ai spoilé un peu mais j’ai vu dans certaines vidéos que C. Martinez parlait de cette grossesse dans ses interviews et je me suis dit que ce n’était donc pas un crime de lèse-majesté de le faire… Et puis tout le monde l’a lu, non? 😉

    1. @ ICB : et ce n’est pas en murmurant qu’elle va mieux attirer ton attention, c’est certain… Et si on place l’autobiographie de Céline Dion, dans ta PAL, il se passe quoi? Tu te jettes dessus? 😆

      1. @ ICB : c’était une blague vaseuse parce que Dion, elle ne murmure pas et coincée entre deux volumes dans une PAL, à mon avis, elle risque de faire tellement de bruit qu’on ne peut qu’avoir envie de la sortir de là… 😉

  9. Lu en début d’année, et je dois dire que j’ai bien aimé (plus que le coeur cousu) et pourtant je reste sur ma faim, j’ai trouvé justement le roman bien court et mince eu égard à la richesse de l’époque, de la proposition et de l’héroïne !

  10. Je l’ai lu, mais je n’avais pas fait de billet (la flemme d’argumenter alors que c’était une impression très personnelle). Le thème ne m’attirait pas plus que cela (moyen-âge, religion…) et c’est uniquement par curiosité que j’ai emprunté le roman (qui se trouvait disponible). Bref, si je n’avais pas été (très) surprise par cet événement que tu évoques mais dont j’ignorais tout, j’aurais arrêté ma lecture. Mais là, du coup, regain d’intérêt et j’ai pu poursuivre. Bon, sans être convaincue pour autant et les passages où elle voit les croisades par les yeux de son père ont fini par m’ennuyer.

    1. @ Brize : moi aussi,les croisades, ça m’a barbée… Je ne l’aurai pas forcément lu s’il n’avait pas été sélectionné par le cercle de lecture dont je fais partie à la médiathèque. Mais j’ai été agréablement surprise sans aller au-delà, toutefois.

  11. Le problème pour moi, c’est qu’un article dans la presse à l’époque avait quasiment tout raconté, et après, pff, plus trop envie de lire un bouquin dont on connait déjà l’histoire (OK, je le fais avec Proust, mais ce n’est pas pareil, ce genre de relecture)

  12. C’est bien dommage que ce livre n’est pas complétement emballé celles qui l’on lu car le sujet et le commentaire que tu en fait donne envie de le lire.

  13. J’ai beaucoup aimé ce livre. Comme pour toi, c’est un « presque coup de coeur ». J’ai trouvé que les passages sur la croisée en terre sainte du père d’Esclamonde traînaient en longueur. J’avais très envie de retrouver la jeune fille en fait !

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