Le grand Cœur

Né à Bourges, Jean-Christophe Rufin a grandi à l’ombre du palais de Jacques Cœur. Il n’en fallait pas plus pour qu’il soit fasciné par cet homme et entreprenne – à défaut de pouvoir faire rapatrier sa dépouille de l’île de Chios où Cœur est mort – une biographie romancée de celui qui fut l’Argentier de Charles VII et le premier à développer les relations commerciales avec le Levant.

Traqué par des ennemis multiples, condamné à rester sur l’île de Chios où il s’est réfugié, Jacques Cœur entreprend de raconter ses mémoires. Son enfance d’abord et sa rencontre avec Macé, celle qui deviendra sa femme. Puis son premier voyage en Orient, son association avec Ravand, un monnayeur peu scrupuleux et comment celle-ci l’a envoyé au cachot pour un temps. Puis il décrit la grande idée de sa vie : développer le commerce, particulièrement avec les pays d’Orient. Pour ce faire, il doit entrer dans les bonnes grâces du roi Charles VII, l’inciter à cesser la guerre qui ravage le pays depuis trop longtemps et développer tout un réseau d’hommes de confiance. Au bout du compte, une richesse infinie, une amitié amoureuse avec Agnes Sorel, la maîtresse du roi et le risque de provoquer, pour ces deux raisons, l’ire du monarque…

Jean Christophe Rufin a mis beaucoup de lui-même dans ce roman et dans la bouche de Jacques Cœur. Il le dit dans la postface. Comment faire autrement puisqu’il ne reste de cet homme que des informations sur sa fortune et son activité? C’est à la fois le mérite et la limite de cette biographie romancée. Elle a l’avantage de faire sortir de l’ombre un homme que l’Histoire telle qu’on l’enseigne néglige souvent, de lui donner cœur et chair, de le rendre vivant, palpitant, amoureux. Mais elle bute aussi sur ces limites historiques. Point de place pour l’imaginaire : les repères historiques constituent des bornes au-delà desquelles l’imagination de l’écrivain ne peut aller. Au final, un roman très bien écrit, qui fait émerger un Jacques Cœur passionné et souvent passionnant mais qui n’est pas exempt de longueurs et pâtit du côté un peu « guindé » que recèle toute tentative biographique.

Le grand Cœur, Jean-Christophe Rufin, Gallimard

23 réflexions sur « Le grand Cœur »

  1. Je l’avais déjà repéré chez notre korrigane nationale (et décoiffée), j’aime assez les romans historiques quand ils sont bien romancés, pas trop étouffants, je le note ! A l’occasion et cela me permettrait de découvrir l’auteur ! 😉

    1. @ Mango : Si l’on met de côté deux ou trois bémols, c’est un beau travail et un roman intéressant. Si tu aimes l’auteur, la lecture de ce Grand Cœur devrait te satisfaire pleinement!

  2. Je dois la lire dans le cadre de notre échange belgo-franco-breton. J’avouoe que la taille du pavé me fait peur : il faudra vraiment que ce soit captivant pour que je ne le lâche pas ! Je suis censée le lire pour le 7 octobre, ahum… Mais je connais déjà et j’aime la plume de JC Ruin, un bon point de départ (j’avais adoré L’Abyssin).

  3. J’ignorais que Jacques Coeur était un voyageur (ma culture générale a des lacunes !) et cette biographie m’intéresse davantage sachant cela…

    1. @ Kathel : et moi donc! Pour moi, c’était le nom d’une petite rue à Paris où habitait ma prof de français – bonjour les références, nulles et datées en plus! 😉

  4. Rufin est un auteur qui m’insupporte. J’ai lu un de ses romans, « Globalia », qui est vraiment très mauvais, mais ce que je ne supporte pas surtout c’est lui, son autosatisfaction qu’il promène partout comme le Grand Auteur qu’il croit être. Beurk.

    1. @ Ys : je ne le connais pas personnellement et ne suis ni les lieux ni les émissions où l’on glose, je n’ai donc aucune idée de ce que peut être son comportement. Et je n’éprouve donc pas le même dégoût que toi à l’évocation de son nom.;-) Je crois que beaucoup d’auteurs finissent par avoir la grosse tête et être persuadés de leur « hauteur ». Il n’est sans doute pas le seul à être atteint de cette maladie-là! On verra dans cinquante ou cent ans si son nom veut encore dire quelque chose…

  5. J’ai bien aimé Rouge Brésil et surtout L’Abyssin, mais je n’ai pas continué ma lecture de JC Rufin, un petit peu pour les raisons qu’évoque Ys et puis parce que ce sont tous des pavés et que je ne suis pas fan des 500 pages voire plus.

  6. J’avais visité il y a quelques temps le palais Jacques cœur de Bourges, je crois que je vais ajouter cette lecture à ma liste!

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